Le droit aux dividendes constitue, avec le droit au boni de liquidation, le droit aux bénéfices. Il s’agit de l’un des droits fondamentaux dont jouissent les associés de sociétés. Pourtant, il est possible sous certaines conditions, de priver certains associés de ce droit. La privation ne doit toutefois porter que sur le droit aux dividendes, à l’exclusion du droit au boni. Toutes les formes de sociétés ne sont pas concernées par cette possibilité. Voici un dossier qui répond à la question : une société peut-elle priver un associé de son droit aux dividendes ?
Le droit aux bénéfices : un droit fondamental des associés
Toute personne qui effectue un apport au capital d’une société obtient la qualité d’associé et bénéficie, en contrepartie, de droits. Parmi eux, on distingue :
- Le droit de vote,
- Le droit à l’information,
- Et le droit aux bénéfices.
Le droit de vote permet à l’associé de se prononcer sur les décisions importantes concernant la société. On distingue les décisions courantes (dites « ordinaires ») et les décisions exceptionnelles qui ont pour effet de modifier les statuts de la société (« extraordinaires »).
Le droit à l’information permet à l’associé d’avoir connaissance de toutes les informations nécessaires à ses prises de décisions. Il concerne les informations financières (comme les comptes annuels par exemple), ainsi que tous les rapports émis par les organes de la société.
Enfin, le droit aux bénéfices est la contrepartie de sa contribution aux pertes. Un associé a droit à la participation aux bénéfices. Celui-ci comprend le droit aux dividendes et le droit au boni de liquidation, perçu lors de la fermeture de la société et assimilé fiscalement à des dividendes.
Aucune forme de société ne peut priver complètement un ou plusieurs de ses associés de l’un de ses droits. Cela dit, il existe certaines subtilités qui permettent de les aménager. Elles consistent à mettre en place des actions de préférence. Mais cette stratégie n’est possible que dans certaines formes de sociétés.
Priver un associé de son droit aux dividendes grâce aux actions de préférence
Les actions de préférence sont des titres qui confèrent des droits de différentes natures à leurs porteurs. Elles sont rassemblées au sein de catégories d’actions. Il existe, par exemple :
- Des actions au droit d’information renforcé,
- Des actions échappant à une éventuelle procédure d’agrément ou de préemption,
- Des actions sans droit de vote, à droit de vote double ou à droit de vote multiple,
- Des actions à dividendes majorés, à dividendes prioritaires, à superdividende,
- …
- Et des actions sans droit aux dividendes (offrant d’autres avantages à leur détenteur) !
Les sociétés par actions peuvent donc priver certains de leurs actionnaires de leur droit aux dividendes dans la mesure où ces derniers ne sont pas privés de leur droit au boni de liquidation. Cette particularité permet à l’associé de conserver partiellement son droit aux bénéfices (le boni de liquidation correspondant, par définition, à l’accumulation de réserves non-distribuées) et ainsi d’échapper à la qualification de clause « léonine », interdite par le Code Civil.
En pratique, peuvent émettre des actions de préférence et donc priver une catégorie d’actionnaires du droit aux dividendes :
- Les sociétés par actions simplifiées (SAS),
- Les sociétés anonymes (SA),
- Et les sociétés en commandite par actions (SCA).
Les sociétés à responsabilité limitée (SARL), les sociétés en commandite simple (SCS) et les sociétés en nom collectif (SNC) ne peuvent, pour leur part, priver un associé de son droit aux dividendes. Leur capital est, en effet, composé de parts sociales et non d’actions. Elles n’ont donc pas la possibilité d’émettre des actions de préférence.
La SAS est la forme juridique qui permet d’exploiter au mieux l’éventail de possibilités des actions de préférence, notamment en matière de droit de vote (actions à droit de vote multiple). Attention, de nombreuses règles encadrent l’émission des actions de préférence, notamment en matière d’information.